Lettera n. 643

Mittente
Manzoni, Alessandro
Destinatario
Fresne, Marcellin de
Data
11 giugno 1842 (11 juin 1842)
Luogo di partenza
[Milan]
Luogo di arrivo
Paris
Lingua
francese
Incipit
Ce gros paquet vous a déjà averti
Regesto

Alessandro Manzoni spedisce a Marcellin De Fresne la copia di un capitolo dei Promessi sposi e di uno della Colonna infame da pubblicare a Parigi, al fine di garantire il proprio diritto d'autore contro eventuali contraffazioni francesi. Lo scrittore si oppone a un'edizione separata della Colonna propostagli da Baudry e trasmette a De Fresne ulteriori disposizioni per trattare con l'editore e libraio parigino. Lo informa, infine, che il marchese di Montgrand si sta occupando di una nuova traduzione del romanzo.

Testimoni
  • (minuta) Milano, Biblioteca Nazionale Braidense, Manz.B.I.45/2, cc. 1-6rv
Edizioni
  • PARENTI 1945, p. 299.
  • ARIETI-ISELLA 1986, lettera n. 643, vol. II, pp. 227-232, note alla p. 793.
Opere citate

Storia della colonna infame; I promessi sposi

+ Testo della lettera

Monsieur,

Ce gros paquet vous a déjà averti que j'use sans ménagement de l'assistance que vous m'accordez d'une manière si aimable et si généreuse. Il ne tiendrait pas à vous, qu'en obtenant au delà de ce que je pouvais souhaiter, je ne fusse délivré même du regret de vous être à charge. Je sais bien qu'un homme comme vous trouve du plaisir à en faire; mais celà même ne peut que redoubler ma reconnaissance. Laissez–moi être un peu confus: vous voyez bien que celà ne m'empêche pas d'être indiscret.
Voici donc les pouvoirs que vous avez bien voulu accepter, la copie des deux chapitres que vous avez bien voulu vous charger de faire imprimer, et une lettre que je vous prie de vouloir bien faire parvenir à son adresse.
Vous n'avez pas attendu mon paquet pour vous occuper de mon affaire; et j'ai vu avec grand plaisir que vous l'aviez déjà entâmée avec M.r Baudry. Vous savez que je ne demande pas mieux que de traiter avec lui, mais non sur le sujet, ni de la manière dont il l'entend. Il me parle d'une édition séparée de la Colonna infame, ce qui ne peut me convenir, d'abord parce que c'est une misère, même pour l'étendue: à peu près huit feuilles ou seize livraisoris de mon édition. (Je vous avouerai même que je suis dans des transes mortelles, autant que des transes d'auteur peuvent l'être, en songeant à l'effet que doit faire son apparition devant le public italien, qui s'attend à quelque chose de considérable. Pour cette grande faim qu'à mes yeux on expose, je n'ai comme Trissotin que peu de chose à donner, avec cette différence que mon public n'est pas si bénévole, ni si facile à se pâmer que le sien. Au surplus, je n'avais rien fait pour le duper; mais j'avais honte de faire matière d'un contrat avec un libraire une telle pauvreté). Ensuite, ce rien devient quelque chose comme addition aux Fiancés; et cette raison seule me suffirait pour ne pas songer à l'en détacher. C'est encore pour celà qu'il pourrait convenir à M.r Baudry d'ajouter cet appendice à son édition, ce qui la rendrait aussi complète que la mienne. Dans ce cas, il n'aurait qu'à s'entendre avec vous pour être autorisé à réimprimer le chapitre sur lequel je vais acquérir le droit d'auteur en France. Mais ce contrat ne devrait avoir lieu, que dans le cas que M.r Baudry consente à traiter en même temps pour la faculté de réimprimer le chapitre 35.ème des Fiancés, sur lequel j'aurai acquis le même droit. M.r Baudry me semble douter beaucoup de la réalité de ce droit; mais je ne suis nullement de son avis. Les expressions de nouveau texte, et d'édition améliorée par l'auteur, dont il s'est servi lui–même dans ses annonces, en sont une reconnaissance anticipée. Il m'écrit que: il y a long temps que les auteurs français ont essayé de ce moyen, sans avoir pu réussir. Je ne sais à quels faits cela peut faire allusion; mais quand même des tribunaux étrangers à la France n'en eussent pas reconnu la validité, cela m'étonnerait, mais ne m'inquiéterait guère; car je ne crois pas que de tels précédents puissent être d'aucune autorité en France.
Si donc après de nouvelles reflexions, M.r Baudry voulait traiter, je lui ai déjà écrit que je lui demanderais d'acheter un nombre d'exemplaires de mon édition. C'est ce que je vous prie de faire en mon nom. Les conditions seraient: 45 pour 100 de bénéfice, sous 13.ème gratis, sur le prix de 40 cents de franc par livraison, qui est celui fixé pour tous les pays, excepté Milan où il est de 35. Ce bénéfice est le plus fort que j'aie fait. Le payement pourrait se faire en différentes époques, le moins éloigné qu'il sera possible. Quant au nombre, je voudrais que ce fût au moins 300 pour les deux objets, et 200 pour le chapitre des Fiancés seul, si M.r Baudry aime à se borner à celui–là. Au reste tout est soumis à votre jugement, et je suis loin de vouloir lier des mains aussi habiles que secourables.
Au but du compte, la compensation que je demande à M.r Baudry se résout en un contrat, qui est loin d'être onéreux pour lui, puisque le bénéfice est tel, qu'en le partageant avec d'autres libraires il pourra encore trouver son compte à donner l'ouvrage au prix d'abomiement. Je sais que ce prix n'est pas en proportion avec celui auquel on est accoutumé en France pour de semblables éditions; mais je sais aussi que l'on y est accoutumé, comme partout, à payer plus cher les éditions étrangères. Ce calcul ne serait pas juste, s'il s'agissait d'une édition entière; mais pour 400 exemplaires, y compris ceux que M.r Baudry a déjà demandés, je ne crois pas que l'écoulement doive en être bien difficile, ni bien long en France, surtout pour lui.
L'arrangement ayant lieu, on pourra, si M.r Baudry le désire, en faire mention sur la petite édition originale des 2 chapitres, après la déclaration par laquelle vous la mettrez sous la protection de la loi. Il serait juste de s'engager avec M.r Baudry à ne pas faire reimprimer en France l'ouvrage entier, et à n'en donner l'autorisation à personne pour un temps, par exemple, jusqu'à la fin de 1844.
Il ne pourrait jamais être question d'autoriser l'entrée de l'édition de M.r Baudry dans les pays, où j'ai le droit d'auteur pour l'édition entière.
Que si M.r Baudry n'agréait pas la proposition, il n'y aurait plus rien à faire pour le moment, car personne autre ne peut songer à une réimpression des Fiancés, et vous savez pourquoi je ne crois pas qu'il faille songer à une édition séparée de la Colonna.
Mais si M.r Baudry jugeait de passer outre à la réimpression du chapitre des Fiancés sur le nouveau texte, alors hélas! hélas! pour moi–même qui abhorre les procès, indépendemment des embarras qu'ils entrainent, mais il n'y aurait plus qu'à soutenir devant les tribunaux le droit que l'on aura acquis.
Vous verrez que les pouvoirs que j'ai joint à cette lettre ont pourvu à tout.
Dans un cas comme dans l'autre, je suis forcé de vous presser indiscrètement pour l'impression des deux chapitres, parce que j'attends la petite édition de Paris, pour faire imprimer sur celle-là le chapitre des Fiancés dans mon édition. Veuillez, aussitôt l'impression achevée, m'en envoyer deux exemplaires sous bande par la poste.
Je croix qu'il suffira de tirer à 250. Je suppose qu'il ne sera pas difficile de trouver un correcteur italien intelligent, et fidèle à la copie.
Il faut conserver exactement l'ortographie vicieuse des passages que l'on à soulignés, pour qu'ils soient imprimés en italique.
J'accepte votre offre amicale de faire l'avance des frais d'impression et autre, en vous priant de me faire connaître ma dette aussitôt.
Quant à la traduction, M.r le marquis de Montgrand, ancien maire de Marseille, s'en occupe dès le commencement de la publication; et mes relations avec lui sont telles que, même avant qu'il m'eût communiqué son projet, je n'aurais pu, sans lui manquer, m'intéresser à aucun autre. Au surplus, mon but n'est pas d'étendre mes spéculations sur ces pauvres Fiancés, mais seulement d'assurer celle qui j'ai entreprise, et que même je n'ai entreprise que dans une autre vue, et presque en désespoir de cause.
Ce que je souhaitais vivement, depuis quelques années, était de pouvoir donner une édition refondue des Fiancés, et cela m'était, pour ainsi dire, inhibé par la contrefaçon, qui me serrait de près, et de tout côté; la convention entre différents états d'Italie, pour la propriété littéraire, n'ayant pas encore eu lieu.
C'est comme au seul moyen de lutter contre cet ennemi, aussi supérieur en forces qu'inférieur en droit, que j'ai songé à une édition illustrée.
Les vignettes offrant le moyen de partager, une édition en petites livraisons, ce qui n'irait pas à une édition commune, j'ai cru que j'aurais sur la contrefaçon l'avance de tout le temps de la publication, et qu'elle devrait attendre que mon édition fût achevée, pour lui marcher sur le corps.
Les auteurs ne passaient pas autrefois pour les gens les plus actifs, et, en vrai auteur d'autrefois, je n'avais pas prévu l'espédient mitoyen auquel M.r Baudry a eu recours.
Or, une édition illustrée exigeant de fortes avances, et par conséquent ne pouvant couvrir les frais, sans un débit étendu, j'avais dû compter aussi sur la vente en pays étranger. La condition que M.r Baudry a mise à cette vente en France, la rendait presque impossible avant l'achèvement de l'édition, et la sienne me faisant une concurrence désastreuse, vous trouverez juste, j'en suis sûr, que je me serve des moyens qu'heureusement la loi me donne pour rétablir en partie l'équilibre. Cela est d'autant plus juste, que ce n'est pas la première réimpression que M.r Baudry fait des Fiancés ainsi que de mes autres ouvrages, et que j'ai aidé en partie moi–même au débit des premières, en les tolérant dans les pays, d'où j'aurais pu les exclure, riême avant la convention susdite.
Est–ce assez vous casser la tête? et pour vous donner de la besogne encore! En fermant ma lettre, j'ai besoin de relire les vôtres, si bonnes, si rassurantes. Adieu, Monsieur; vous devinez, je l'espère, mieux que je ne saurais l'exprimer, tout ce que ma nouvelle reconnaissance a du ajouter à la haute estime, et à l'affection cordiale que je vous avais vouées depuis longtemps.

Alexandre Manzoni

P.S. — En attendant que je puisse vous envoyer d'ici un exemplaire complet de l'édition que vous avez pris sous votre protection, veuillez accepter, comme matière à chiffonner, les livraisons qui sont arrivées à Paris. M.r Baudry vous les remettra en mon nom.
Comme vous pourriez peut–être trouver utile de montrer ma lettre à M.r Baudry, je vous fais ces lignes à part, pour vous prier de prendre lecture de la lettre à cachet volant, avant de la transmettre toute cachetée à son adresse, et pour vous dire plus explicitement encore, que pour le nombre des exemplaires vous devez faire ce que vous jugerez utile.
Adieu de nouveau; car je ne sais pourquoi, en profitant de votre bonté, il me semble y avoir acquis, par–dessus le marché, le droit de vous traiter encore davantage en ancien ami. N'est–ce pas trop prétendre?