Lettera n. 158

Mittente
Manzoni, Alessandro
Destinatario
Fauriel, Claude
Data
6 marzo 1822 (ce 6. Mars 1822)
Luogo di partenza
Milan
Luogo di arrivo
Paris
Lingua
francese, latino
Incipit
je viens enfin de donner
Indirizzo
A Monsieur | M.r C. C. Fauriel | rue neuve de Seine n.o 68. faub. S. Germain | à Paris
Regesto

Manzoni scrive a Fauriel a proposito del suo lavoro all'Adelchi, che sta per essere spedito alla censura, e al Discorso sopra alcuni punti della storia longobardica in Italia; offre alcuni suggerimenti sulla traduzione delle proprie tragedie che il Fauriel intende eseguire e lo prega di correggere alcuni luoghi della Lettre allo Chauvet.

Testimoni
  • (originale) Milano, Biblioteca Ambrosiana, S.P.29, n. 40
    (Timbro postale: «Mars | 22 | 1822»)
Edizioni
  • DE GUBERNATIS 1880, p. 331.
  • SFORZA 1882-1883, vol. I, p. 227.
  • SFORZA 1912-1921, vol. II, p. 9.
  • ARIETI-ISELLA 1986, lettera n. 158, vol. I, pp. 258-262, note alle pp. 832-834.
  • BOTTA 2000, lettera n. 69, pp. 336-341, note alle pp. 341-346.
Opere citate

Adelchi; Discorso sopra alcuni punti della storia longobardica in Italia; Il Conte di Carmagnola; Lettre à M.r C*** sur l'unité de temps et de lieu dans la tragédie

+ Testo della lettera

Cher ami; je viens enfin de donner Adelchi à mettre au net, et j'espere que dans quinze jours à-peu-près, il sera copié, approuvé par la censure, et livré à la diligence. Je vous ai raconté cela tout d'une haleine, avant même de vous dire bonjour, parce que j'avais sur la conscience de n'avoir pas encore répondu directement à la proposition plus qu'aimable que vous avez bien voulu me faire; et qu'il me tardait de vous en montrer toute ma reconnaissance, et tout mon empressement à en profiter, quoique il me soit impossible de ne pas la trouver un peu extraordinaire. Je vous avertirai par une autre lettre du jour précis du départ du manuscrit, et je vous indiquerai celui au moins probable de son arrivée au bureau de la diligence à Paris; je me ferai donner ici l'adresse de ce bureau, et je vous la communiquerai. Mon retard à vous écrire a été causé, d'abord par le défaut absolu d'occasions particulières, et aussi par l'espoir ou j'étais de pouvoir d'un jour à l'autre vous mander que ma besogne était achevée; espoir éludé et prorogé tous les jours par la nécessité toujours renaissante de corriger et de refaire. J'ai eû peut-être mille vers à effacer, ce qui a exigé des substitutions, moins nombreuses à la vérité, mais d'un travail long et plein d'hésitation: la tragédie en est restée bien épurée; et je crains fort qu'elle ne ressemble à toutes les sociétes qui en différents temps ont subi cette opération. Ce maudit discours historique avait aussi besoin d'être recomposé en grande partie; et pour surcroit j'ai dû rimer deux Choeurs liriques, dont l'un sur tout m'a semblé indispensable pour porter l'attention sur ce qu'il y a de plus serieux et de plus poétique dans le sujet que j'ai maltraité: ce qui ne pouvait se developper dans l'action, ni par les discours des personnages. Voila dejà bien des discours sur mon petit monstre romantique; mais je suis loin de vous avoir tout dit; il faut absolûment que je vous en parle au long. Vous l'avez voulu; c'est vous qui par votre singulier projet avez fait d'Adelchi une affaire: or les affaires il faut les traiter. Mais au moins que je vous dise auparavant que j'ai été toujours dans l'attente, toujours frustrée, de recevoir de vos nouvelles. Madame de C[ondorcet] a annoncé à Maman un envoi qui nous devait venir par le moyen d'un improvisateur: eh bien, il est demeuré court avec nous: nous n'avons jamais entendu parler de lui ni de son paquet, ce qui nous contrarie au dernier point; car dans la rareté et la difficulté des communications de l'amitié, il parait que ce n'est pas trop exiger que de pretendre au moins à jouir de celles qui nous sont annoncées. D'après les calculs que vous m'aviez communiqués sur l'époque probable de l'achèvement d'une partie de votre travail historique, je dois me flatter que les nouvelles qui m'en parviendraient à-present, me l'annonceraient; ainsi mon dépit de n'en pas recevoir est en proportion du plaisir que j'en espère. Mais ce qui me confond c'est la pensée que moi même à-present je vais devenir une cause de retard à la publication de votre ouvrage, en vous donnant une occupation bien au-dessous de ce qu'on attend de vous: il est vrai que j'obéis à vos ordres; mais cette obeissance est si intéressée de ma part, et le projet au quel je me prête est si singulier, que j'en éprouve du remords et il me semble de devenir un complice. Car en relisant mon travail, j'y trouve une | quantité de choses qui, si elles étaient rendues dans une traduction fidele en français, n'y seraient pas supportables: pour les rendre telles, il faut au talent et à l'adresse, du temps; et comment se resigner à l'idée que le votre doive être gaspillé pour un tel travail? Ainsi je vous previens que je ne serai nullement étonné si après avoir parcouru le manuscrit, vous m'avertirez que vous avez mis de côté le projet de le traduire. Que si vous persistez, il faut absolument que je vous communique quelque idée là-dessus. Je vais donc vous parler comme à mon traducteur. «Dii immortales!» que les rangs sont intervertis; et que l'on voit bien que nous vivons dans un siècle de révolutions!
Ce n'est pas à moi à vous donner liberté entière sur Adelchi pour les changemens que vous trouveriez à propos d'y faire; vous l'avez de plein droit, sous tous les rapports. Vous trouverez une liste effrayante de personnages, dont les noms sont plus lombards que ceux des personnages de Pertharite, qui ont tant dégouté Voltaire. Pour ceux qui sont historiques, c'est un mal irréparable, mais pour les personnages inventés, peut-être pouvez-vous les rendre moins baroques en les redressant sur la racine germanique qui est presqu'effacée dans les noms comme je les ai estropiés pour les italianiser. Ainsi je vous previens que je les ai tirés de l'index propriorum nominum que Grotius a ajouté à son recueil des historiens Goths, Vandales etc. Cet index se trouve aussi dans le Rerum Italicarum I.e vol. pag. 373. Il y a une notice historique, que j'ai faite aussi courte qu'il m'a été possible, mais que vous trouverez peut-être le moyen d'abréger. Quant au discours, je ne vous l'envoye que par le desir que j'ai de vous presenter l'ouvrage dans son entier, tel qu'il sera publié ici: et pour celui-la au-moins je suis sûr que l'idée de le traduire ne vous viendra pas. Car vous verrez au premier coup d'oeil qu'il est écrit dans un but tout-à-fait spécial pour des lecteurs italiens; c'est une réfutation d'opinions que je crois erronées, et qui ont été répandues (s'il y a quelque chose de répandu dans ce genre) par nos historiens, et qui composent une grande partie de notre capital d'idées sur l'histoire. Ainsi l'intérêt de ce discours, fort mince en Italie serait à-peu près nul en France, ou l'on n'a pas les préjugés que je me suis efforcé de signaler pour tels. Au reste j'ai encore un autre garant que vous ne prendrez pas cette peine inutile: avant de connaitre votre projet, j'avais mis dans mon discours quelques lignes, qui vous fâcheront, et que vous ne voudriez pas traduire pour tout l'or du monde; et je n'ai pas eû la complaisance de les effacer après. Pour Carmagnola, indépendamment de toutes les corrections que vous aurez pu faire, je vous en indiquerai une qui ne vous donnera pas trop de peine: c'est d'omettre la distinction entre les personnages historiques, et idéaux: et je vous prie de mettre une ligne en note à l'endroit de l'article de Goethe qui regarde ce point, pour avertir le lecteur que c'est pour faire droit à cette critique fort juste, que la distinction a été effacée. |
Vous recevrez, avec Adelchi, les deux articles de Goethe que vous n'avez pas lus et que vous souhaitez voir. C'est à vous absolument de juger s'il est à propos de les ajouter au premier. Parmi les corrections par les quelles vous avez bien voulu rendre un peu plus française et un peu plus raisonnable ma pauvre lettre à M.r C[hauvet] il y a deux petits changemens sur les quels j'ai quelque difficulté à vous proposer: je vais le faire avec cette liberté que me donne votre ancienne bonté pour moi. Thèse toujours hasardeuse (dans la première page) ne me semble pas rendre précisément mon idée, qui est d'exclure toute sorte de raison, et toute chance de succès du projet de défendre ses ouvrages, c'est-à-dire de prouver que l'on a bien fait. Ne tenez aucun compte de cette observation, si elle vous parait une vétille; dans l'autre cas, ayez la bonté de substituer un autre mot. 2.o Dans l'endroit ou j'ai parlé de l'étonnement d'une grande partie du public sur ce que des grands revers n'avait pas été suivi d'un suicide, mon intention était de rappeler quelque chose de la vie réelle, et de l'histoire de nos jours: dans la copie que vous avez eû la bonté de m'envoyer, cet étonnement ne se rapporte qu'à des compositions dramatiques. Peut-être avez vous eû quelque motif que je ne puis comprendre d'ici, pour retrancher tout ce qui pouvait avoir rapport à des personnages et à des événemens récens. Pour ce qui me regarde, je crois qu'il n'y aurait aucun inconvénient; pour toutes les autres considérations, c'est à vous d'en juger, et de faire ce qui vous paraitra convenable. Voila bien des raisonnemens pour deux phrases; et voila toute ma feuille remplie de balivernes. Je ne publierai ici la tragédie que six semaines après le départ du manuscrit: si vous souhaitez un plus long retard, veuillez m'avertir à temps de vos intentions. Pour que votre lettre me parvienne plus promptement, je vous prie de la mettre dans une enveloppe portant cette adresse: Al Signor Giovanni Luigi Tosi, ricapito Ajroldi, Lugano, Suisse, Canton du Tésin. Avec toutes ces indications il y aura du malheur si je ne la recois pas. Il ne me reste pas d'espace pour vous parler de mes sentimens pour vous et du regret perpetuel que l'absence y mêle, mais est-il-besoin de vous en parler? Maman et Henriette saluent bien tendrement M.me de C[ondorcet] et je vous prie de ne pas m'oublier auprès d'elle. Embrassez pour moi Cousin, mes complimens à M.r Thyerri etc. Rappelez moi au souvenir des personnes de ma connaissance que vous voyez. Visconti se joint à moi pour vous le demander. Son manuscrit viendra un mois après le mien.
Je vous embrasse, et vous écrirai bientôt de nouveau. J'attends deux lignes de vous avec impatience.
Je vous prie de ne pas attendre ma seconde lettre pour m'écrire.