MANZ. 12. 0022 [Postillato] Milano, Biblioteca Nazionale Braidense

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2.

Rousseau blesse d’un côté et le commentateur mêt son emplâtre de l’autre. R. n’a pas dit qu’il soit immoral de representer vicieux le fils d’un avare, mais <I>de faire aimer le fils insolent</i>. Et pour que le Spectateur prenne dans son Coeur le parti d’un personnage, il n’est pas necessaire que l’écrivain justifie la [<i>su</i> sa] manière d’agir qu’il lui prête, il suffit qu’il la rende interessante, et qu’il lui donne un degré de justice qui suffit aux passions.

Luogo dell'opera: Avvertissement de l’éditeur sur L’avare
Termine o passo postillato: [p. 187] Ecoutons M. Rousseau de Genève. C’est un grand vice d’être avare et de prêter d’usure; mais n’est-ce pas un plus grand encore à un fils de voler son père, de lui manquer de respect, de lui faire mille insultants reproches; et quand ce père irrité lui donne sa malediction, de répondre d’un air goguenard, qu’il n’a que faire de ses dons? Si la plaisanterie est excellente, n'en est-elle moins punissable? Et la pièce où l’on fait aimer le fils insolent qui l’a faite, en est-elle moins une école de mauvaises moeurs? M. Riccoboni avoit fait cette critique dans ses observations sur la comédie, pag. 255 et suiv. Il avoit dit, en 1736, que Molière, à cet egard, i>avoit sacrifié les moeurs à l’esprit, et son devoir è son génie. Cependant il cherche à excuser notre auteur sur ce défaut, par la violence de la passion du jeune homme, par l’obstacle déraisonnable qu’on met à son mariage, par la disette d’argent où il se trouve, par le désespoir où le jette l’infâme usure de son père, et enfin par sa jeunesse. Il observe d’ailleurs qu’après avoir exécuté ce que l’enthousiasme de son genie lui demandoit, Molière est revenue sur ses pas, et n’a rien oublié pour corriger la faute qu’il avoit faite dans le caractère de Cléante, en nous montrant ce jeune homme rapportant le trésor de son père, et le suppliant avec décence de lui accorder Mariane. Il est difficile de voir, avec M. Riccoboni, cette décence, qui ne consiste, de la part du fils, qu’à rapporter la cassette à son père, et à s’en faire un droit pour épouser Mariane; mais on ajoutera à ce |qu’il vient de dire pour la défense de Molière, qu’en voulant peindre à son siècle le vice de l’usure et de la basse avarice, il n’avoit pas dû oublier ces grands traits de la nature, qui nous montreront toujours un homme aussi vil qu’Harpagon, méprisé par tout ses entours, et dépoullié même de tous les droits d’un père, parce que lui-même est sans tendresse pour ses propres enfants, comme Molière l’a marqué expressement dans la scène quatrième du cinquième acte, lorsqu’Harpagon dit à sa fille: Il valoit bien mieux pour moi qu’il te laissât noyer, que de faire ce qu’il a fait. L’impertinence de ses valets avec lui, et le défaut de soumission de ses enfans, est le vrai châtiment de l’Avare; et Molière eût manquè son bût, s’il nous l’eût offert comme un maître plus redouté, et comme un père plus heureux. S’il arrivoit à quelqu’un de vouloir tracer le caractère d’un mauvais père, ne lui donneroit-il que des enfants pleins de vertu? Peindroit-il la bénédiction du ciel répandue sur toute sa famille? Et la vérité ne le conduiroit-elle pas à tracer les désordres d’un fils rebuté par sa sévérité et par ses injustices, et peut-être l’honneur de sa fille dans le plus gran danger. Cet écrivain justifierait-il par-là l’inconduite du fils ou les foiblesses de la fille? Non, mais il verseroit dans la classe des pères de famille un utile effroi; ils les rameneroit au plaisir et à l’intérêt de se faire aimer.